Dictée pour les Nuls
Foire du livre 2019, dimanche 10 novembre, Brive-la-Gaillarde
Coup de feu pour les queux
Dans quelque trente minutes, il sera onze heures et demie. Toutes les cuisines limousines vont entrer en effervescence !
Tendons l’oreille… Dans un restaurant tout proche, le maître queux hèle l’un de ses gâte-sauces :
– Va-t’en me quérir du lut avant que je mette ma cocotte au piano !
– Je viens de luter votre cocotte, monsieur !
– Eh bien, trousse ces deux poulettes !
– Plaît-il ?
– Attache-leur les pattes et les ailes, assujettis-les sur leurs flancs, ranges-en avec soin les jointures afin que les deux sot-l’y-laisse soient d’une tendreté plus moelleuse que jamais ! Pendant ce temps, dans mon faitout, mijotent des gélinottes qui se sont laissé imprégner du parfum des échalotes.
– Bien monsieur !
– Ensuite, trie les cerneaux que j’ajouterai aux pleurotes rissolés, puis pèle les bintjes. Ne lave pas les truffes, frotte-les délicatement avec une brosse ! Penses-y ! Il faut que tu acquières de bonnes habitudes.
– Ne préparé-je pas aussi des magrets que notre commis sert en quête de reconnaissance ?
– Si… mais non ! Débarde plutôt des foies !
Deux quidams passant dans la rue hument les exhalaisons aromatiques s’échappant de l’antre enchanté où cuisent à petit feudes garbures enrichies de lard, de choux et de confits d’oie ! Tout cela se mêle aux effluves sucrés des flognardes aux pommes, des clafoutis aux cerises noires.
– Quelle gouleyante liqueur de Bacchus peut-on servir chez cet amphitryon ? s’enquiert l’un d’eux.
– Un coteau de la Vézère peut-être, lui répond son compagnon ;ou bien un vin paillé, autant de nectars qui ont ressurgi après la tragédie du phylloxéra survenue en mille huit cent soixante-seize !
– Vite, entrons, la dictée se termine et tous les concurrents affamés vont se précipiter ici !
– N’aie crainte, ils sont déjà repus !
– Vraiment ?
– Bien sûr ! Avec le texte qui leur fut mitonné, ils ont dégusté !
Phrase-torpille
Êtes-vous un leptosome végan et convaincu, avide de matefaims, de quelque fruit hiémal et indéhiscent chu d’un arbre marcescent ? Ou bien vous sied-il, en bon pycnique, de savourer un phô au flanchet ou quelque hampe à l’époisses ? Quels que soient votre nature et vos goûts, sachez que tout ici, selon Curnonsky, se fait, au four ou à la broche, « sans beurre et sans reproche » !
Jean-Joseph Julaud