• Maupassant, le bel amant, deuxième partie

    by  • 30 mai 2013 • Extraits • 0 Comments

    Maupassant Revue illustrée

    Maupassant Revue illustrée

     

    Extrait de La Littérature française pour les Nuls, éditions First, 2005.

    Boule de suif, Une vie, Bel-Ami…

    De trente à quarante ans, Maupassant va écrire sans relâche, nouvelles, romans, poursuivi par les souffrances de la syphilis qui ne lui laisse guère de répit !

    Trois cents nouvelles !

    Boule de Suif paraît trois mois avant la mort du solitaire de Croisset (le 8 mai 1880) qui peut constater, avant de disparaître, combien son enseignement rigoureux a porté ses fruits. La prose se révèle donc le terrain d’élection de Maupassant. Après avoir publié un recueil de ses poésies, en 1880 – Des Vers -, il commence à répondre aux commandes des journaux qui publient des contes et des nouvelles. Entre 1880 et 1890, il en écrit presque trois cents ! Elles sont régulièrement rassemblées en volumes, publiées en alternance avec ses essais, ses romans. Maupassant acquiert une fulgurante célébrité. Ses œuvres, lues dans toute l’Europe lui rapportent des sommes considérables – sa fortune est la plus importante de l’époque, dans le monde littéraire ! Généreux, il en redistribue une partie à sa mère, dépensière hors mesure, à son frère qui ne trouve pas d’emploi,  à ses amis, à ses maîtresses…

     

    Les enfants de Maupassant

    Maupassant n’a pas eu d’enfants. Du moins officiellement. En réalité, sa descendance doit être au moins aussi importante que celle du Vert-Galant (un certain Henri IV…) car l’activité qu’ils ont déployée en ce domaine atteint parfois les trente-cinq heures par semaine… Un véritable métier dont les conséquences, pour Guy de Maupassant, ont la forme de trois visages. Trois visages et trois prénoms : Lucien, né en 1883, Lucienne née en 1884, et Marguerite en 1887. Leur mère, Joséphine habite Vincennes. Maupassant l’a connue pendant une cure dans la station thermale de Châtelguyon. Bien qu’il ne reconnaisse pas ses enfants, il subvient à leurs besoins et à ceux de Joséphine qui meurt en 1920 – Lucien en 1947, Lucienne en 1949, Marguerite, qui a eu deux filles, en 1951.

    Exploits de chasse

    Maupassant fuit les lieux à la mode où on le demande, les salons. Il aime la solitude, le canotage. Et lorsqu’il n’est pas seul, ou qu’il ne canote pas, on le trouve en galante compagnie  – et même galantes compagnies, au pluriel… – ! En ces occasions, fort nombreuses, il aime prouver que sa puissance n’est pas liée à la seule extrémité de sa plume. Flaubert, son presque père – ou plus que père – rapporte, dans sa correspondance, des épisodes fort gaillards et à peine croyables dont il a été le témoin : Maupassant y fait montre de capacités sexuelles hors du commun ! Sinon, quoi d’autre ? Eh bien, il fait construire à Étretat, une luxueuse villa qui lui sert de thébaïde pour l’écriture et de départ pour de longues chasses – sa grande passion – dans la campagne environnante.

    En voyage !

    Accompagné de son valet de chambre et futur biographe, François Tassart, il voyage en Corse, en Algérie – parle d’Alger la Blanche… -, en Tunisie, sur les pas de Flaubert, en Bretagne, en Italie, en Angleterre, en Tunisie. Il en rapporte des reportages pour les journaux Le Gaulois ou le Gil Blas. En 1887, alors que Zola vient de recevoir le précieux ruban de la Légion d’Honneur dont il rêvait, Maupassant refuse catégoriquement la Croix, à plusieurs reprises, comme l’avait fait son maître, Flaubert. Mais, soucieux d’offrir à ses livres les meilleures pistes d’envol vers ses lecteurs, il se soucie de plus en plus de leur faire de la réclame – pour parler moderne : de la publicité !

    Maupassant en six romans

    En sept ans, de 1883 à 1890, Maupassant publie six romans, qui ne représentent qu’une mince part de son activité débordante.

    C’est d’abord, en 1883, Une Vie – l’histoire de Jeanne, douce, candide, trompée par son mari Julien, puis rançonnée par son propre fils Paul.

    En 1885, paraît Bel-Ami – l’ascension de l’audacieux Georges Duroy dans le milieu du journalisme, de la politique et de la finance ; Duroy qui devient du Roy… aimé et aidé de toutes les dames ; si vous le lisez, ne manquez pas le passage sur les bilboquets !

    1887 est l’année de Mont-Oriol : des amours et des affaires dans une station thermale.

    1888, Pierre et Jean : deux frères se découvrent demi-frères – la préface de ce roman est peut-être plus connue que le roman lui-même ; Maupassant y précise ses convictions concernant le roman, en empruntant davantage au réalisme de Flaubert qu’au naturalisme de Zola.

    En 1889, il publie Fort comme la mort, un roman psychologique : un peintre de cinquante ans se rend compte qu’il aime la fille de son ancienne maîtresse.

    Dernier roman achevé, en 1890, Notre Cœur : un éventail des différents types humains dans le Paris bourgeois et sous la plume fatiguée de Maupassant

    Un monte-en-l’air…

    Il décide de frapper les imaginations en faisant fabriquer une montgolfière qui va rallier Paris à la Belgique. Il faut trouver un nom à ce ballon. Sans hésiter, Maupassant propose : le Horla – c’est le titre de son dernier conte fantastique ! Hélas, l’effet n’est pas celui qu’il attendait. Au lendemain de l’exploit, on se moque de lui dans les journaux où il peut lire, par exemple : Maupassant, un monte-en-l’air… Maupassant est aussi un va sur l’eau. D’abord en canot, puis, la fortune venue, sur le magnifique voilier qu’il a acquis : le Bel-Ami – du nom de son roman. Ce voilier l’emmène en croisière, notamment en Méditerranée.

    Baudelaire, Flaubert, Maupassant, tant d’autres…

    Le grand drame de Maupassant, celui qui va gâcher une partie de son existence et nous priver de nouveaux contes, et des romans qu’il se préparait à écrire, ce drame serait de nos jours soigné en une ou deux semaines. Une ordonnance banale prescrirait deux gélules le matin et deux gélules le soir, d’un dérivé de la pénicilline. Personne ne s’apercevrait que la plus terrible maladie vénérienne est passée par là – celle qui a tué Baudelaire, Flaubert, Daudet, et tant d’autres – : la syphilis ! On pensait à cette époque que cette maladie était bénéfique, qu’elle donnait à l’homme une nouvelle vigueur !

    D’atroces migraines

    La réalité de cette terrible maladie est tragique : elle peut foudroyer en quelques semaines, ou bien s’endormir  et se réveiller sans prévenir, rendant aveugle, ou aphasique, ou fou, ou tout cela à la fois.  Pour Maupassant qui l’attrape à vingt-sept ans, la vérole va prendre son temps, lui infliger d’atroces migraines qu’il soigne à l’éther, paralyser l’un de ses yeux, provoquer des hallucinations, le martyriser jusqu’en 1892 où il perd la raison après avoir tenté de se suicider ! Soigné dans la maison de santé du docteur Blanche – qui a déjà tenté de soulager Nerval – il meurt le 6 juillet 1893. Sa tombe se trouve au cimetière Montparnasse, à Paris.

     

    Maupassant en recueils

    1880 : Boule de Suif – 1881 : La Maison Tellier – 1882 : Mademoiselle Fifi – 1883 : Contes de la Bécasse, Clair de lune – 1884 : Miss Harriet, Les Sœurs Rondoli, Yvette – 1885 : Contes du jour et de la nuit, Monsieur Parent – 1886 : Toine, La Petit Roque – 1887 : Le Horla – 1888 : Le Rosier de Madame Husson – 1889 : La Main gauche – 1890 : L’Inutile beauté. Deux recueils posthumes : 1899 : L’Inutile beauté – 1900 : Le colporteur.

     

    Citez l’auteur

    Maupassant en pensées

    Un baiser légal ne vaut pas un baiser volé – Confession d’une femme

    Le baiser est la plus sûre façon de se taire en disant tout – Correspondance

    La mort. Que ce mot si court est insondable et terrible – Correspondance

    La vie, voyez-vous, ce n’est jamais si bon ni si mauvais qu’on croit – Une Vie

    La moindre chose contient un peu d’inconnu. Trouvons-le – Pierre et Jean

    La vraie peur, c’est quelque chose comme une réminiscence des terreurs fantastiques d’autrefois – La Peur

    De toutes les passions, la seule vraiment respectable me paraît être la gourmandise – journal le Gil Blas

     

     

    Jean-Joseph Julaud – La Littérature française pour les Nuls – Editions First, 2005

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