• Dictée de Grasla, inspirée du magnifique livre d’Yves Viollier « La Nuit d’après »

    by  • 22 juillet 2018 • Actualités • 0 Comments

    Yves Viollier

    Yves Viollier

    Samedi 21 juillet 2018

    Dictée pour les Nuls, forêt de Grasla, Vendée

    La nuit d’après

     

    Il était une fois Joseph, un as de la douelle, des merrains de chêne avec lesquels il a fabriqué moult demi-muids de plus de six cents litres. Des centaines de tierçons, fûts de cinq cent cinquante litres, se sont succédé dans son atelier. Les demi-barriques et quartauts qu’il a créés ne se comptent plus. Joseph le tonnelier aux yeux bleu-vert, avec sa bigorne, sa colombe de cerisier !

    Il était une fois Églantine, douce et fine, vêtue ce jour-là d’une longue robe de princesse, nouée de rubans mauves et orange, un jour de noce pendant la guerre, le treize mai mille neuf cent quarante-trois. « Pourvu que ce soit lui, mon cavalier ! » a-t-elle pensé.

    Ce fut lui.

    Ils se sont regardés, ils se sont plu, ils ne se sont plus quittés ! Se sont-ils trahis, se sont-ils nui ou menti ? Jamais, et si cela eût été, ils se seraient réconciliés dans l’instant.

    Églantine et Joseph ! L’amour de la vie, la passion du bois. Pour lui égoïne affûtée, trusquin ajusté et bédane biseauté. Pour elle l’épicerie approvisionnée les mardi et jeudi de chaque semaine en jolis agrumes, en primeurs installées avec soin. Pour eux deux le même courage dès l’alcôve quittée.

    Au fil du temps ont vu le jour cinq enfants qui, les dimanches après-midi, se sont égayés et égaillés sur les plages du repos hebdomadaire.

     

    Les juniors commencent ici la dictée

     

    Joseph et Églantine ! Quel fut leur secret pour avoir pu résister à l’insoutenable lorsque s’en alla, par une nuit de pluie, leur fille de dix-huit ans ? Quelle force leur a permis de bâtir, en partant de rien, un petit royaume du bois où évoluait une escouade de vingt employés, tout entière dévouée aux belles idées de Joseph – entre autres, celle du lit de milieu ?

    Nul ne l’a su vraiment.

    Joseph a disparu voilà deux ans. La nuit d’après, un étrange rossignol chanta. Églantine a surmonté son chagrin, elle a souri, comme au premier jour, et elle a dit :

    « Pourvu que ce soit lui ! »

     

    Jean-Joseph Julaud

     

    Phrase-torpille pour les experts

     

    Dans une forêt équienne et vosgienne aux arbres sciaphiles, une coupe à blanc-étoc avait détruit cépées resserrées et conifères, gaulis emmêlés, charmes au feuillage marcescent, plantes pennatiséquées. Les schlittes s’étaient chargées de troncs. Au sol demeuraient akènes éclatés, anthères écrasées sur des bractées joliment colorées.

    Samedi 21 juillet 2018

    Dictée pour les Nuls, forêt de Grasla, Vendée

    La nuit d’après

    Correction

     

    Il était une fois Joseph, un as de la douelle, des merrains (bois débité en planches) de chêne avec lesquels il a fabriqué moult (ou moults, accord toléré par Larousse) demi-muids de plus de six cents litres. Des centaines de tierçons, fûts de cinq cent cinquante litres, se sont succédé dans son atelier. Les demi-barriques et quartauts qu’il a créés ne se comptent plus. Joseph le tonnelier aux yeux bleu-vert, avec sa bigorne, sa colombe de cerisier !

    Il était une fois Églantine, douce et fine, vêtue ce jour-là d’une longue robe de princesse, nouée de rubans mauves et orange (mauves est obligatoirement au pluriel à cause de la liaison faite lors de la lecture), un jour de noce pendant la guerre, le treize mai mille (ou mil) neuf cent quarante-trois. « Pourvu que ce soit lui, mon cavalier ! » a-t-elle pensé.

    Ce fut lui.

    Ils se sont regardés, ils se sont plu, ils ne se sont plus quittés ! Se sont-ils trahis, se sont-ils nui ou menti ? Jamais, et si cela eût été, ils se seraient réconciliés dans l’instant.

    Églantine et Joseph ! L’amour de la vie, la passion du bois. Pour lui égoïne affûtée, trusquin ajusté et bédane biseauté. Pour elle l’épicerie approvisionnée les mardi et jeudi de chaque semaine en jolis agrumes, en primeurs installées avec soin. Pour eux deux le même courage dès l’alcôve quittée.

    Au fil du temps ont vu le jour cinq enfants qui, les dimanches après-midi, se sont égayés et égaillés sur les plages du repos hebdomadaire.

     

    Les juniors commencent ici la dictée

     

    Joseph et Églantine ! Quel fut leur secret pour avoir pu résister à l’insoutenable lorsque s’en alla, par une nuit de pluie, leur fille de dix-huit ans ? Quelle force leur a permis de bâtir, en partant de rien, un petit royaume du bois où évoluait une escouade de vingt employés, tout entière dévouée aux belles idées de Joseph – entre autres, celle du lit de milieu ?

    Nul ne l’a su vraiment.

    Joseph a disparu voilà deux ans. La nuit d’après, un étrange rossignol chanta. Églantine a surmonté son chagrin, elle a souri, comme au premier jour, et elle a dit :

    « Pourvu que ce soit lui ! »

     

     

    Phrase-torpille pour les experts

     

    Dans une forêt équienne (dont tous les arbres ont été plantés en même temps) et vosgienne aux arbres sciaphiles (qui aiment l’ombre), une coupe à blanc-étoc (à ras) avait détruit cépées (touffes de jeunes tiges de bois) resserrées et conifères, gaulis (taillis aux longues branches) emmêlés, charmes au feuillage marcescent (en repos végétatif), plantes pennatiséquées (aux limbes pennés – la fougère). Les schlittes (traîneaux vosgiens pour les troncs d’arbres) s’étaient chargées de troncs. Au sol demeuraient akènes (le gland par exemple) éclatés, anthères (parties d’étamines) écrasées sur des bractées (feuilles de couleur) joliment colorées.

     

    Jean-Joseph Julaud

     

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